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Star Trek Online

Toutes nos croisades

By Nevandon | Tue 24 Jan 2017 09:00:00 AM PST

Le lieutenant Tzenkethi Hulrun posa les yeux sur l'écran de sa station où s'affichaient les données des capteurs du vaisseau. Un coup d'œil rapide lui permit de voir les marqueurs qu'on lui avait assignés. Positif, pensa-t-il. Cela ne fait aucun doute. Je dois faire mon rapport. Il se leva de son fauteuil et fit face à son officier commandant.

Je dois condamner des milliards de personnes à la mort.

Le capitaine Yur Tzen-Crinnu fixait silencieusement l'écran central, tandis qu'Hulrun émergeait de devant sa station. Le maître du vaisseau de guerre de la coalition Steadfast  était noble de naissance ; la présence du mot Tzen  dans son patronyme en était la preuve pour son équipage. Malgré sa position dans la société tzenkethi, le capitaine avait pris la peine de retenir le nom de ses membres d'équipage, afin de travailler et combattre à leurs côtés. Ce n'était pas courant pour un homme de son statut ; un tel comportement était souvent mal vu par la haute société tzenkethi. Mais il ne s'en souciait guère, et cela lui avait fait gagner l'estime de son équipage. À cause de cela, Hulrun était réticent à l'idée de partager avec lui ce qu'il venait d'apprendre. Bien qu'il ne soit qu'un messager, Hulrun savait que la décision finale d'annihiler toute forme de vie sur la planète revenait au capitaine... et une telle décision serait difficile à porter, bien plus que de transmettre la nouvelle.

« Quelque chose vous tracasse ? », demanda Tzen-Crinnu, en détournant son regard de l'écran pour se tourner vers le jeune officier. « Vous n'êtes habituellement pas du genre à rester tapis dans l'ombre comme une bête aux aguets. »

« Capitaine », dit Hulrun avec hésitation. « La sonde à longue portée est de retour. Le système ciblé a été classé comme positif. Le précepte autarchique 1219 nous oblige à… »

« Oui, lieutenant, je connais très bien le précepte en question. Je l'ai déjà suivi trois fois. Considérez votre devoir comme accompli et retournez à votre station. »

Alors qu'Hulrun obtempérait, Tzen-Crinnu suivit le protocole. Des ordres avaient été donnés ; l'équipage les exécuta. Le Steadfast accéléra à travers le système vers la planète cible à la vitesse de distorsion maximale. L'Autarch était formel : une fois qu'une cible était déclarée positive, elle devait être détruite dès que possible. L'hésitation était perçue comme une faiblesse, et la faiblesse n'était pas tolérée.

Sur les ponts inférieurs, les techniciens commençaient à préparer l'arme, une prouesse scientifique aux terribles répercussions, expression ultime de la puissance de l'Autarch : une bombe à protomatière. Son explosion pouvait éradiquer toute forme de vie sur une planète en l'espace d'un instant.

Il suffisait d'un mot.

Sachant que le processus de destruction était déjà en cours, Tzen-Crinnu se tint droit et fit un simple mouvement de la tête à son officier. « Vous avez les commandes », dit-il platement. « Et demandez aux cuisines de préparer mon dîner. » Silencieusement, il activa son téléporteur personnel et s'en alla hors de la vue de son équipage. En se rematérialisant dans ses quartiers, il se dirigea vers un vieil ouvrage disposé sur une étagère.  Le livre portait les armoiries de sa famille, et recensait les exploits de ses aïeuls. Il l'observa respectueusement avant de l'ouvrir lentement.

« Pères, mères, de votre éclosion jusqu'à ce moment, partagez avec moi votre sagesse. Je suis votre humble descendant, et je suis perdu. Guidez-moi vers la voie que je dois suivre. »

***

« Capitaine », dit la voix monotone de l'ordinateur. « Le lieutenant Hulrun demande la permission d'entrer. Dois-je l'y autoriser ? »

Tzen-Crinnu ferma le livre, et se releva pour le remettre à sa place.

« Oui.  Faites-le entrer. » L'officier pénétra dans la pièce l'instant d'après, et salua avant de déposer son arme de poing dans le compartiment près de l'entrée. Il se tenait au garde-à-vous, en silence, et essayait d'afficher un air calme et serein ; un exercice auquel il échoua lamentablement.

« Détendez-vous, lieutenant. Je pense savoir ce qui vous amène, dit le capitaine. Je vois bien que vous êtes perturbé. Pourquoi ? »

« Capitaine, je... désire émettre une objection », dit le jeune officier nerveusement. « Officiellement. »

« Je vois. « Vous avez conscience qu'une fois que votre déclaration sera enregistrée, il sera impossible de la retirer de nos registres... quelle que soit la raison. »

« Oui, monsieur. Je souhaite tout de même procéder à ma demande. »

Tzen-Crinnu le regarda d'un œil sévère. « Si vous êtes vraiment sérieux, j'aimerais en connaître la raison, lieutenant. J'aimerais savoir pourquoi un officier prometteur comme vous mettrait sa carrière, et sa vie, en péril. Parlez. »

Hulrun s'éclaircit la voix avant de répondre. « Je souhaite protester car il ne s'agit pas de notre façon de faire. Cette méthode est lâche, et... et... »

« Oui ? Continuez, lieutenant. »

« Il ne s'agit pas de la voie du juste. Il ne s'agit même pas de la voie de la violence. Mais seulement de la voie de la folie. »

Tzen-Crinnu pointa calmement du doigt une oriflamme en lambeaux, tachée et partiellement brûlée qui pendait de l'un des murs de sa cabine.

« Savez-vous ce dont il s'agit, lieutenant ? »

« Il s'agit de la bannière de votre premier vaisseau, monsieur... à l'époque de la guerre contre la Fédération et l'Empire.

« Oui. Je l'ai portée fièrement pendant toute la durée du conflit. C'est moi-même qui l'ai retirée alors que notre vaisseau en feu était sur le point de s'écraser, tandis que les villes de Betazed en-dessous de nous étaient elles aussi en proie aux flammes. Je l'ai emporté avec moi dans une prison de la Fédération peu de temps après. » Tzen-Crinnu fixa du regard un moment la bannière avant de continuer.

« Le temps passa, et l'Autarch déclara que Tzenketh suivrait la voie de la paix. La Fédération m'autorisa à garder cette bannière, et me relâcha. Je la garde ici pour me rappeler cette campagne, ce que nous avons perdu... et la voie de la folie qui nous a menés à tout ceci. »

« Capitaine ? Je... je ne comprends pas. La guerre contre la Fédération était... »

« Une folie, lieutenant ! Toute cette guerre n'était que folie ! Aucune personne saine d'esprit n'aurait attaqué la Fédération, et encore moins les forces combinées de la Fédération et de l'Empire ! »

« Mais notre cause était juste ! Ils avaient pris des terres sacrées, des mondes sacrés ... »

« Rien de plus qu'un simple malentendu. Au final, nous avons combattu au nom de l'Autarch, au sujet d'un affront réel ou imaginé, au gré de sa volonté. Nous les avons fait saigner, nous les avons brûlés, mais finalement, c'est nous qui avons été mis à genoux. Et nous nous sommes rendus ; le fils de l'Autarch a pris le pouvoir, réclamant vengeance pour son père.

« Et il est notre Autarch depuis ce jour », dit Hulrun. « Que le vide intersidéral ait pitié de nos âmes. »

« Pitié », cracha Tzen-Crinnu « Voilà un mot qu'il ne connaît pas. « Une main qui met fin à autant de vies sans relâche n'est pas menée pas la pitié. »

« Non, dit Hulrun. Mais par la folie, oui. Et c'est pourquoi je me tiens là pour protester. Je ne peux pas fermer les yeux devant un massacre d'innocents commis au nom de la folie. »

« Vos intentions sont claires, lieutenant. Avant que nous ne continuions, j'ai une contre-proposition à vous faire. Écoutez-moi plutôt... »

***

Le capitaine Tzen-Crinnu regarda l'image du monde qu'ils avaient pris pour cible sur son écran tactique. Une planète de classe M, fertile et auto-suffisante, abritant une civilisation préindustrielle composée de milliards d'individus, et totalement inconsciente de la menace qui planait sur elle.

« Lieutenant Hulrun, dit-il. La bombe à protomatière a-t-elle été placée et amorcée ? »

« Oui », répondit Hulrun depuis sa station. « L'équipe a été téléportée à nouveau sur le vaisseau.  Nous attendons vos ordres. »

« Très bien, Hulrun. Voici votre ordre. Procédez. »

Hulrun pianota une séquence de touches sur sa console. Quelques secondes plus tard, une salve de missiles jaillit du Steadfast en direction de la planète, engloutissant le site et réduisant à néant l'effroyable bombe.

Un silence stupéfait plana sur la passerelle pendant plusieurs secondes, suivi du son de pistolets sortis de leurs étuis.

« Pure folie, s'exclama l'un des officiers. Vous avez suivi la voie de la folie ! »

« Non », dit le capitaine tandis qu'Hulrun se joignait à son côté pour faire front. « La folie aurait été de suivre les ordres et de détruire cette planète. Je suis un autre chemin à présent. »

« Moi aussi, enchaîna Hulrun. Et vous devriez vous joindre à nous. »

Aucun coup de feu ne fut tiré. Des appels commençaient à affluer en provenance des autres passerelles tandis que les pistolets étaient rengainés. Le capitaine s'assit et sourit.

« Le reste de l'équipage se pose des questions », dit-il à ses officiers de passerelle. « Tâchons de leur donner les réponses qu'ils cherchent. Navigateur, quel est le système de la Fédération le plus proche ? »

« Izar, monsieur. À quatre jours en vitesse de distorsion maximum. »

« Mettez le cap dessus », répondit Tzen-Crinnu. « Il y a certaines choses que la Fédération doit savoir, et vite. »

 

Paul Reed
Content Writer
Star Trek Online

 

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